Libye: La classe politique libyenne, fortement divisée, a réagi de manière négative à l’annonce de l’initiative d’Abdoulaye Bathily, l’envoyé spécial de l’ONU en Libye. Ce dernier a lancé lundi, devant le Conseil de sécurité, une nouvelle proposition pour sortir de l’impasse en Libye, et organiser des élections générales « inclusives et transparentes » en 2023.
L’émissaire des Nations unies a estimé que les institutions libyennes dont les mandats sont arrivés à expiration doivent retrouver une « légitimité ». Il prévoit d’établir un panel de pilotage de haut niveau pour mettre en place un calendrier menant aux élections. De nombreux responsables libyens ont été pris de court par cette initiative, certains craignant la fin de leur mandat. L’un des plus grands problèmes dont souffre la Libye, c’est la corruption d’une classe politique qui s’accroche au pouvoir, une réalité qui a été mentionnée dans plusieurs rapports de l’ONU.
Dans sa première réaction, Khaled el-Michri, président de Conseil suprême de l’État, une institution au rôle consultatif, a considéré que la proposition de l’ONU est « dangereuse » et « constitue une atteinte à la souveraineté nationale ». Quant au Parlement, il a accusé la mission onusienne de partialité : « seul le Parlement possède le droit de légiférer », a-t-on annoncé.
Le Parlement a d’ailleurs publié unilatéralement dans le Journal officiel un treizième amendement au cadre juridique pour la tenue des scrutins. Le Conseil suprême de l’État avait ajourné à trois reprises sa réunion pour discuter de cet amendement.
Lundi, devant le Conseil de l’ONU, Abdoulaye Bathily a notifié ces divergences entre les deux institutions, reprochant au texte publié au Journal officiel de ne pas préciser de date pour l’organisation des élections. De fait, le mécanisme proposé par Abdoulaye Bathily permet à l’envoyé spécial de contourner le blocage persistant entre les deux institutions. Son initiative est en quelque sorte une troisième voie pour sortir de l’impasse.
Pour ce faire, il a choisi une troisième voix, loin des institutions, une sorte de comité mixte composé de personnalités libyennes qui n’occupent pas de postes au pouvoir et de membres de la société civile. Un peu à l’image du comité formé par l’ancienne conseillère du secrétaire général de l’ONU, l’Américaine Stéphanie Williams en 2020. Mais ce nouveau comité sera restreint : une quarantaine de membres qui seront chargés entre autres de nommer le comité qui supervisera les élections.
Les réactions internationales
À noter que Washington a organisé jeudi dernier une réunion du groupe de contact pour la Libye en présence de l’émissaire onusien. Des représentants de l’Égypte, de la France, de l’Allemagne, de l’Italie, du Qatar, des Émirats et de la Turquie étaient présents. Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken avait alors estimé qu’il est important d’organiser le scrutin le plus tôt possible. En 2023, avait indiqué un communiqué du département.
L’Égypte s’est elle montrée réticente à cette initiative. Son représentant à l’ONU a estimé que toute proposition doit passer par le Parlement et le Conseil suprême de l’État libyen. Quant à la Russie, elle a mis en garde contre toute précipitation à organiser les élections.