Madagascar : A Madagascar, les paramédicaux tirent la sonnette d’alarme face aux agressions et vols qu’ils subissent dans les zones rurales, une insécurité qui règne depuis plusieurs années, dénoncent-ils.
L’agression, fin décembre 2022, d’un infirmier à Antsalova, dans l’ouest du pays a, à nouveau, secoué la profession qui regroupe, dans la Grande Île, environ 7 200 infirmiers, infirmières, sages-femmes ou encore techniciens de laboratoire. Ces derniers réclament une protection pour pouvoir exercer leur travail en toute sérénité.
« L’insécurité démotive »
Alors que les trois quarts des quelque 3 000 centres de santé de base de la Grande Ile sont tenus par des paramédicaux, leur rôle primordial, en particulier dans les zones reculées, est mis à mal.
« En tant que gestionnaire d’un centre de Santé qui comprend une pharmacie et une gestion de petits fonds, les malfaiteurs pensent peut-être que les paramédicaux ont de l’argent. La population vit dans l’extrême pauvreté dans certaines zones. Les agressions varient en fonction des régions et des périodes. Pendant les périodes de soudure, par exemple, il y a des attaques et des vols envers le personnel. […] L’insécurité démotive non seulement les paramédicaux mais tout agent de Santé et même tout fonctionnaire. C’est pour ça que les médecins ne veulent pas travailler dans ces endroits et c’est nous, les paramédicaux, qui nous nous en occupons », explique Jerisoa Ralibera, infirmier et secrétaire général de la solidarité syndicale de Madagascar.
Peur des représailles
Une dizaine d’attaques ont été enregistrées l’année dernière mais celles-ci seraient en réalité plus nombreuses, selon les syndicats qui expliquent que certains agents de Santé vivent dans des zones trop enclavées pour les rapporter ou ne les dénoncent pas par peur de représailles.
« Beaucoup ont peur d’aller travailler mais les paramédicaux n’ont pas le choix parce que c’est très difficile d’avoir un poste. Normalement, quand nous faisons des missions, il doit y avoir des gendarmes pour nous accompagner mais ils réclament une indemnité que nous ne pouvons donner et c’est ça le problème. On ne sait plus quoi faire. Si on ne fait pas notre travail, on va nous donner tort mais si on le fait, on ne sait pas si on va rester en vie ou mourir. Certaines agressions sont liées à la pauvreté mais il y aussi des histoires de rancunes envers les agents de Santé », raconte une sage-femme de Melaky, région où plusieurs cas d’attaques ont été rapportés, ces derniers mois.
Flavien Razanakolona vice-président du syndicat des paramédicaux et infirmier dans la région Ihorombe, dans le sud de l’île, déplore l’inaction des autorités: « On ne peut plus exercer sereinement alors qu’on travaille déjà très dur 7j/7 et 24h/24. Ce n’est pas juste une ou deux fois qu’il y a eu des agents de Santé victimes de kidnapping, morts, tués par balle ou blessés grièvement en accomplissant leurs tâches. Quand on va faire un vaccin, on doit marcher 5 à 15 kilomètres. On part avec notre glacière seulement. On n’a pas d’arme, personne pour nous protéger. On travaille pour les Malgaches mais on travaille dans la crainte. On a demandé l’aide de l’État central et il a dit qu’il va faire quelque chose mais jusqu’ici il n’y a rien. Il n’y a pas de mesures adéquates. »
Les paramédicaux demandent aux autorités l’application de la loi relative au statut des fonctionnaires qui dispose que l’État doit garantir la sécurité de ces agents. Ces derniers demandent, entre autres, de faciliter la communication avec les communautés locales et de mettre en place des postes avancés de gendarmerie dans les communes touchées par l’insécurité et où se trouvent des centres de Santé de base et des écoles.