Une travailleuse humanitaire québécoise qui en est à sa 3e mission en Haïti constate à quel point la situation s’est dégradée depuis 25 ans dans ce pays où les gangs armés règnent maintenant en rois et maîtres, terrorisant la population locale.
«Il y a une détérioration flagrante. Presque tous les quartiers sont contrôlés par les gangs. Si on veut se déplacer, on doit payer des redevances. Il y a trois semaines, il y a un autobus au complet qui s’est fait kidnapper», témoigne Gaby Breton.
Elle est arrivée sur l’île d’Hispaniola en janvier, où elle se déplace entre Les Cayes, Cap-Haïtien et dans la capitale, Port-au-Prince, où elle est établie depuis mai et où les groupes armés ont la mainmise sur 80% du territoire.
«C’était mieux après le tremblement de terre de 2010, au moins on pouvait se déplacer sans avoir peur», laisse-t-elle tomber.
Entassés dans les écoles
Elle se désole de voir les rues désertées par les gens qui se réfugient chez eux ou fuient le pays à cause des pillages. Dans la capitale, seulement deux hôpitaux sur cinq fonctionnent.
Dès que les gangs prennent le contrôle d’un quartier, les gens se réfugient dans les églises et les écoles, seuls lieux où ils se sentent en sécurité.
«C’est terrible. Ils sont sur le sol, ils n’ont presque pas à manger et je ne parle pas des conditions sanitaires. Les corridors et les escaliers sont remplis», se désole la travailleuse humanitaire.
Son travail consiste entre autres à aider les gens à quitter les lieux en leur donnant un premier montant de 120$ pour répondre à leurs besoins de base et ensuite d’autres subventions pour qu’ils puissent se relocaliser et même démarrer une entreprise.
Pendant ce temps, l’organisme déploie un programme d’éducation d’urgence pour les enfants dans les maisons voisines.
Des drames humains, la travailleuse humanitaire en voit quotidiennement, comme cette dame qui n’arrivait plus à nourrir ses cinq enfants et l’un des cinq fils l’a laissée pour aller rejoindre les gangs.
Appel à la solidarité
Mme Breton est la seule Québécoise parmi les 109 employés de Save The Children en Haïti, parmi lesquels on compte surtout des Haïtiens. Elle veut lancer un message de solidarité pour «ne pas que les Haïtiens tombent dans l’oubli, surtout les enfants».
Le gouvernement canadien devrait s’impliquer plus, selon elle et pas seulement en soutenant la force nationale. «La sécurité, c’est super important, mais on a aussi besoin de soutien pour l’éducation, le programme de relance économique», souligne-t-elle.