La première image publique d’Abdelhakim Belhaj, qui figure sur la liste saoudienne des terroristes, remonte à l’été 2011. Sur la chaîne qatarie Al-Jazeera et en direct de Bab al-Aziziya, résidence de Mouammar Kadhafi, il annonce qu’il est le chef du conseil militaire de la ville Tripoli après avoir libéré la ville. Il a fait de l’aéroport et la base militaire Maaitiga son quartier général d’où il dirige milices et sociétés. Il est parmi les 100 Libyens qui se sont enrichis après la révolution.
Selon une liste qui recense une centaine de nouveaux riches de Libye, la fortune d’Abdelhakim Belhaj s’élève à deux milliards de dollars. Né en 1966 dans la capitale libyenne, l’homme est connu pour avoir fait des longs séjours à l’étranger par le passé. Il s’est rendu au Pakistan, au Soudan, en Turquie et en Afghanistan en 1988 avant de regagner la Libye en 1994, et d’intégrer le groupe islamiste combattant Al-Moqatila qui voulait renverser le régime.
Passé trouble
Mais Mouammar Kadhafi frappe les bases d’entraînement de ce groupe à Jabal Akhdar à l’est de la Libye en 1995. Belhaj retourne en Afghanistan. Là-bas son groupe issu d’al-Qaïda se réorganise et le nomme émir.
En 2004, à Kuala Lumpur, en Malaisie, Abdallah al-Sadek – de son nom de guerre – se fait arrêter avec sa femme enceinte par les renseignements américains qui le livrent à Kadhafi. Il reste en prison à Tripoli pendant sept ans. Aujourd’hui, il accuse les renseignements américains et britanniques d’être responsables des actes de tortures qu’il a subis en prison. Une affaire qui est actuellement devant la justice à Londres.
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Il est libéré de la prison d’Abou Slim en 2011 avec 214 autres islamistes après une médiation des Frères musulmans. Parmi eux, figure Ali al-Sallabi et Cheikh Youssef al-Qaradaoui. Tous deux figurent aujourd’hui comme lui sur la même liste saoudienne de terroristes.
D’émir d’al-Qaïda à homme d’affaires
Selon les révélations de WikiLeaks, il aurait trouvé en 2011 dans un coffre-fort de la résidence de Mouammar Kadhafi 75 millions de dollars qu’il aurait partagés avec deux autres personnes.
Le militaire se recycle alors en chef de parti politique. Il vit à Tripoli avec ses deux femmes, l’une soudanaise et l’autre marocaine et il fonde al-Watan (« la patrie » en français), parti islamiste qui participe aux élections de juillet 2012, sans obtenir le succès qu’il espérait.
En 2013, il fonde sa société de transport aérien, Al Ajniha. Il aurait emprunté 750 millions de dollars au Qatar pour acheter des avions qui sont restés bloqués à Malte faute d’autorisation d’atterrir à Tripoli.
Un an plus tard, une coalition de milices extrémistes envahit la capitale, détruit l’aéroport principal et occupe les lieux. Cet aéroport n’a jamais rouvert.
L’aéroport militaire Mitiga s’ouvre alors à l’aviation civile et Belhaj y rapatrie ses avions. Ses hommes exercent des pressions sur les voyageurs ayant préféré la compagnie nationale à la sienne. Les vols de la compagnie libyenne sont systématiquement retardés de plusieurs heures, les appareils sont sabotés sur le tarmac.
Trafic de migrants
Récemment, un rapport parlementaire du parti conservateur britannique mentionnait le nom de Belhaj parmi les chefs des milices qui profitent directement du trafic de migrants.
Abdelhakim Belhaj est un parmi de nombreux extrémistes islamistes ou membres des Frères musulmans qui sont installés au pouvoir à Tripoli, avec le soutien évident et l’appui financier du Qatar comme le prouvent des documents révélés non seulement par l’Arabie saoudite, mais aussi la Tunisie et des factions libyennes anti-islamistes, dont le clan Kadhafi.
rfi.fr