Tirailleurs : Le 4 janvier dernier, le jour de la sortie du film Tirailleurs, le gouvernement français a annoncé que les anciens combattants d’origine sénégalaise, malienne ou mauritanienne, pourraient désormais percevoir la totalité du minimum vieillesse (950€ par mois) sans être obligés de vivre la moitié de l’année en France. Ceux qui ont participé aux guerres mondiales sont morts. Les derniers tirailleurs vivants ne sont plus que quelques dizaines.
C’est un ancien tirailleur de 94 printemps qui nous reçoit. Courtois, souriants et dynamiques, ses compagnons de guerre sont à ses côtés dans sa chambre de 15 m². Eux aussi ont combattu pour la France. « Je vous présente monsieur Diop, un ancien d’Indochine. Il a 95 ans. Il n’est pas en bonne santé, il a presque toutes les maladies. Après monsieur Mbodji, ancien combattant d’Indochine et d’Algérie », indique Yoro Diao.
Il porte son costume. La poitrine est bardée de médailles, pas loin d’une dizaine. Quand il s’est engagé dans l’Armée française, la question ne s’est pas posée, c’était une tradition familiale. « Je voulais rentrer dans l’Armée, comme mes cousins, mes parents… Sinon, j’aurais été la risée de mes cousins qui m’auraient traité comme un moins que rien. Il me fallait un métier », se souvient le tirailleur.
Des combattants naturalisés français qu’en 2017
Il sera infirmier brancardier sur les champs de bataille en Indochine et en Algérie. Il a sauvé des vies et a perdu des frères d’armes. « Il a été tué à mes pieds en Indochine en 1954, au nord du Vietnam… », montre l’ancien combattant sur un album de photos souvenirs qui ne le quitte plus.
Ces anciens tirailleurs qui ont sacrifié leur vie et leur jeunesse n’ont été naturalisés qu’en 2017. C’est une première reconnaissance et jusqu’ici, pour percevoir leur minimum vieillesse, ils devaient rester au moins 6 mois en France chaque année.
Pour Aïssata Seck, présidente de l’Association pour la mémoire des tirailleurs sénégalais, c’est la fin d’un long combat administratif. « Ils vont rentrer définitivement, c’était leur souhait et c’était la suite logique pour nous des différents combats menés. Ils vont pouvoir vivre d’une manière décente dans leurs pays d’origine et entourés des leurs. »
Pouvoir retrouver leur famille
Alors, ce minimum vieillesse, accordé 60 ans plus tard, comment Yoro Diao le prend-il ? « Il vaut mieux tard que jamais, évidemment. Cela va peut-être prolonger moralement notre vie », pense-t-il. « Vous savez ce qu’est un bain de lézard ? C’est de sortir au soleil avec une chaise longue », poursuit Yoro Diao. Une vie que l’ancien combattant espère désormais mener. « C’est ça qui est la pièce maîtresse. Et nous sommes très ravis ! »
Ravis aussi de pouvoir retrouver bientôt sa famille. Au foyer, le quotidien n’est pas facile. « Il faut tout le temps sortir pour chercher à boire, des bouteilles d’eau, pour chercher à manger, rentrer dans le bus pour se faire soigner », raconte Yoro Diao. « Parfois, on se fait bousculer dans le bus, quelquefois on vous vole vos affaires. Une fois, on m’a dit de faire attention, que je n’avais pas de force pour un ancien combattant », ajoute-t-il.
Et comme lui, ils sont près d’une vingtaine prêts à retourner chez eux au pays.